Ce 1er décembre 2020 entreront en vigueur les dispositions de la loi du 4 avril 2019 qui sont relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre entreprises[1]. Les nouvelles dispositions sont insérées dans le Code de droit économique (CDE). Il s’agit des articles VI 91/1 à VI 91/10.
Ces articles ne s’appliquent pas aux contrats déjà conclus avant le 1er décembre 2020 mais aux contrats conclus, renouvelés ou modifiés après cette date. Les nouveaux articles concernent toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, et tous les contrats sauf les services financiers et les marchés publics ainsi que les contrats qui en découlent.
Les clauses abusives sont interdites et peuvent être déclarées nulles. La nullité n’affecte pas le contrat lui-même qui reste contraignant pour les parties sauf s’il ne peut subsister sans les clauses abusives.
Qu’est-ce qu’une clause abusive ?
Il s’agit d’une clause qui, à elle seule ou combinée avec une ou plusieurs autres clauses, crée un déséquilibre manifeste entre les droits et obligations des parties (art VI 91/3 CDE).
Il est important de souligner que ne sont pas concernées par l’examen du caractère abusif, les clauses qui déterminent l’objet du contrat ou le prix à payer pour les produits ou les services fournis pour autant que ces clauses soient formulées de manière claire et compréhensible
Même si l’article VI.91/3 §2 donne quelques lignes directrices pour apprécier le caractère abusif d’une clause, le critère de déséquilibre manifeste me paraît être source d’incertitude. Il s’agit d’un concept qui reste vague, qui ouvre la porte à l’insécurité juridique et donnera sans doute lieu à des litiges.
Le législateur a cependant pris la peine, outre la définition générale de la clause abusive interdite, d’établir deux listes de clauses qui sont, soit réputées, soit présumées créer un déséquilibre manifeste et sont donc abusives
Les clauses « noires » : elles sont considérées comme abusives et interdites (art VI.91/4 CDE).
A titre d’exemple, est abusives la clause potestative qui prévoit un engagement irrévocable de l’autre partie, alors que l’exécution des prestations de l’entreprise est soumise à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté.
Les clauses « grises » : elles sont présumées abusives mais la preuve contraire peut être apportée (art VI.91/5 CDE).
On retrouve dans cette catégorie, par exemple, la clause qui autorise l’entreprise à modifier unilatéralement et sans raison valable le prix, les caractéristiques ou les conditions du contrat ou encore la clause pénale qui dépasse manifestement l’étendue du préjudice susceptible d’être subi par l’entreprise en cas d’inexécution ou de retard d’exécution de l’autre partie.
Veiller, lors de la rédaction des contrats actuellement en préparation, à ne pas insérer des clauses figurant dans la liste des clauses noires ou grises (sauf dans ce cas, si l’une des parties peut justifier d’éléments d’appréciation complémentaire qui permettent de démontrer l’absence de déséquilibre manifeste). De manière générale, veiller à ce que des clauses ne créent pas de déséquilibre (manifeste) entre les droits et obligations de chacun. Procéder à la relecture, et le cas échéant à l’adaptation, des conditions générales existantes.
Geron, Avocat au Barreau de Liège-Huy
[1] Cette loi comporte trois parties qui entrent en vigueur à des dates différentes: outre la partie consacrée aux clauses abusives, la partie relative aux pratiques déloyales du marché est entrée en vigueur le 1/09/2019 et celle relative aux abus de dépendance économique est entrée en vigueur le 1/06/2020.
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