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30 Jan 2024 | Civil Law & Litigation

La révision des prix dans les marchés publics

Le législateur a réglementé, depuis de nombreuses années, les clauses de révision des prix en matière de marchés publics. Les dispositions en vigueur actuellement sont contenues dans les articles 38 et suivants de l’arrêté royal du 14 janvier 2013 établissant les règles générales d'exécution des marchés publics, tel que modifié le 22 juin 2017 (entrée en vigueur le 30 juin 2017).

Cet Arrêté Royal (AR en abrégé) est classiquement appelé « RGE » ou « AR Exécution ».

Dans ces marchés, le pouvoir public ou le maître d’ouvrage est appelé adjudicateur, tandis que le cocontractant est appelé l’adjudicataire.

La formule de révision

L’article 38/7 de l’AR, relatif à la révision des prix, détermine les conditions d’application d’une telle clause et, plus particulièrement, les caractéristiques d’une formule de révision des prix, laquelle doit :

  1. Être basée sur des « paramètres objectifs et contrôlables » ;
  2. Utiliser des coefficients de pondération appropriés ;
  3. Refléter la structure réelle des coûts ;

Cette formule peut comporter un facteur fixe, non révisable, en fonction de la nature du marché.[1]

Les clauses de révisions peuvent être reprises dans tous les marchés et sont obligatoires pour certaines catégories de marchés, soit les marchés de travaux et certains marchés de services.[2]

Elle n'est pas obligatoire pour les marchés d'un montant estimé inférieur à 120.000 euros et lorsque le délai d'exécution initial est inférieur à cent-vingt jours ouvrables ou cent-quatre-vingts jours de calendrier.

La révision, palliatif au bouleversement de l’équilibre contractuel au détriment de l’adjudicataire

L’article 38/9 de ce même Arrêté Royal permet également à un adjudicataire de solliciter la révision du marché « lorsque l'équilibre contractuel du marché a été bouleversé au détriment de l'adjudicataire par des circonstances quelconques auxquelles l'adjudicateur est resté étranger ».

Cette révision peut consister :

  • soit en une prolongation des délais d'exécution,
  • soit, lorsqu'il s'agit d'un préjudice très important, en une autre forme de révision ou en la résiliation du marché.

Pour ce faire, l’adjudicataire doit, dans les trente jours de leur survenance (ou de la date à laquelle l'adjudicataire ou l'adjudicateur aurait normalement dû en avoir connaissance) :

  • dénoncer par écrit, les faits ou les circonstances sur lesquels il se base (article 38/14) ;
  • faire connaitre (au moins) de manière succincte à l'adjudicateur l'influence de ces faits ou circonstances sur le déroulement et le coût du marché (article 38/15).

La justification chiffrée de la demande doit ensuite être communiquée à l’adjudicateur dans des délais prévus à peine de déchéance, qui varient selon la modification sollicitée :

  • pour une prolongation de délai, avant l’échéance du délai contractuel ;
  • pour une révision autre ou des dommages et intérêts, 90 jours après la réception provisoire des travaux ;
  • pour une révision ou des dommages et intérêts fondés sur un événement survenu pendant la période de garantie, 90 jours après la réception définitive (article 38/16).

Le réexamen, palliatif au bouleversement de l’équilibre contractuel en faveur de l’adjudicataire

L’article 38 prévoit également la possibilité d’insérer dans un marché une clause de réexamen, qui est obligatoire dans les marchés de travaux et facultative dans les marchés de services (38/7).

Une telle clause trouve à s’appliquer lorsque l’équilibre du marché est bouleversé en faveur de l’adjudicataire, du fait de circonstances auxquelles l’adjudicateur est resté étranger.

C’est ici l’adjudicateur qui a la possibilité de solliciter la modification du marché. Il peut solliciter :

  • la réduction des délais d’exécution ;
  • lorsque l’adjudicataire tire un « avantage très important », une autre forme de révision des dispositions du marché ou la résiliation du marché.

L’adjudicateur doit dénoncer les faits ou les circonstances sur lesquels il se base dans les trente jours (38/14) et introduire sa demande au plus tard 90 jours après la réception provisoire du marché (article 38/17).

L’avantage ou le préjudice très important
L’avantage ou le préjudice, visés aux points 3 et 4, est considéré comme « très important » lorsqu’il excède 2,5% du montant initial du marché pour :

  • les marchés de travaux ; et
  • les marchés de fournitures visés à l’annexe 1 de l’arrêté royal (études de sols, défrichement, abattage d’arbres, élagage, réalisation et entretien des espaces verts, élimination des déchets sauvages, élimination, traitement et transport des boues, services relatifs aux sols contaminés, de traitement de déchets toxiques, services de voiries, de nettoyage des rues, de curage des avaloirs, de nettoyage des plages et d’enlèvements de graffitis).

Il en est de même lorsque l’avantage ou le préjudice excède 15% pour les marchés de fourniture et de services autres que ceux visés à l’annexe 1 de l’AR RGE.

Pour les gros marchés, lorsque le marché est passé sur la base du prix, du coût du service, ou que le rapport qualité-prix représente plus de 50% des points d’attribution, des seuils sont prévus par l’AR au-delà desquels l’avantage ou le préjudice est toujours considéré comme « très important ». Tel est le cas lorsque l’avantage tiré par l’adjudicataire ou le préjudice qu’il subit du fait du changement des circonstances dépasse :

  • 175.000 euros lorsque le prix initial du marché oscille entre 7,5M et 15M euros.
  • 225.000 euros lorsque le prix initial du marché oscille entre 15M et 30M euros.
  • 300.000 euros lorsque le prix initial du marché est supérieur à 30M euros.

Me Julien Feltz, avocat du barreau de Liège-Huy – L’auteur attire l’attention du lecteur sur le fait que la présente contribution a une vocation de vulgarisation et s’inscrit dans la cadre de « brèves ». Elle n’est, à ce titre, pas exhaustive.


Références

[1] Auparavant, un facteur fixe de 20% devait obligatoirement être prévu – cette obligation a depuis été abrogée.

[2] Exception faite des marchés dont le montant estimé est inférieur à 120.000 ET dont le délai d’exécution est inférieur à 120 jours ouvrables/180 jours calendrier.

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