21 Mar 2018 | Avocats, Général, Today's lawyer

L’avocat libéré
Opgelet: dit artikel werd gepubliceerd op 21/03/2018 en kan daardoor verouderde informatie bevatten.

50% des tâches des avocats juniors sont automatisables.  52% des juristes d’entreprise veulent des solutions numériques. 85% des clients estiment que leurs avocats sont trop chers. L’avenir est-il aux robots ?

Tout va extrêmement vite. La croissance exponentielle du volume de données, les capacités de stockage, la vitesse des ordinateurs et des transmissions, la puissance des algorithmes, la multiplication des legal start up donnent le tournis.

L’intelligence artificielle  ouvre des perspectives de gestion automatisée des données (data mining), d’interaction vocale avec l’ordinateur (chabots), de gestion intelligente et apprenante de la connaissance (maching learning). Au-delà des mots, les nouveaux outils comprennent les concepts et bientôt les idées, un jour peut-être les émotions. Ils vont pouvoir donner des consultations juridiques en ligne. Les robots Ross et Peter en sont les premiers avatars.

Dans ce monde en mutation rapide, ces nouveaux services numériques du droit transforment les attitudes et les besoins des consommateurs. Ils ouvrent la voie à la simplicité, à la transparence et à la réactivité. Ceci explique le succès des plateformes de documents ou de consultations en ligne. Ce nouveau mode de consommation du droit bouleverse le modèle classique de l’avocat. L’automatisation des processus et l’accès en ligne obligent l’avocat à délaisser les activités à faible valeur ajoutée, à modifier son mode de tarification, à augmenter sa productivité. Le nouveau consommateur de droit réclame de la lisibilité et du pragmatisme dans les réponses juridiques. Comme cela se pratique pour les autres services, le consommateur digital veut noter les services de son prestataire. (4)

L’avocat engoncé dans ses certitudes a perdu peu à peu le contact avec la réalité du client. Avec ses méthodes artisanales, il affronte difficilement la révolution digitale. Dans les années 80, il a dû suivre la mondialisation et l’internationalisation de l’économie et du droit. Aujourd’hui, il découvre le nouveau consommateur digital. Face à lui apparaissent des concurrents (souvent des robots) qui ont automatisé le travail juridique de base.

L’avocat n’a plus le monopole de la connaissance. Son organisation obsolète engendre des cloisons, des îlots, des refus de partage de clients et de connaissance. La révolution numérique met son modèle à mal puisqu’elle ouvre la connaissance, pousse à la transparence et au mode collaboratif. (2)

Le marché du droit n’a jamais été aussi florissant. Les nouveaux modèles créent des nouveaux besoins (le droit des robots, le sécurité informatique, …) et des nouveaux consommateurs. Le monde se complexifie et en réponse les législations se multiplient à tous les niveaux de pouvoirs. Les acteurs juridiques n’ont pas de soucis à se faire pour leur marché. L’avocat doit en rester un acteur incontournable avec ses atouts d’indépendance, de compétence, de déontologie et d’assurance.

Confronté à ces évolutions, il a deux réactions possibles : soit, il ignore, soit, il anticipe en s’aidant du monde digital pour transformer sa profession, augmenter ses compétences, se libérer des tâches administratives répétitives et se concentrer sur l’essence même de la profession : l’humain.

Pour effectuer cette mue, l’avocat doit améliorer son organisation et se doter de nouveaux outils. Pour accroître sa mobilité, il va supprimer le papier, mettre en place une organisation dématérialisation des données. Cette stratégie va permettre de développer une intelligence collective en donnant accès à tous à la connaissance du cabinet. Les développements fulgurants de l’intelligence artificielle ouvrent à l’avocat des perspectives nouvelles pour gérer la connaissance, organiser les données, anticiper – avec les outils prédictifs – l’issue des procédures, et dégager du temps pour affiner son rôle de conseiller et de défenseur par l’écoute empathique et le partage d’expérience.

« Il faut associer l’intelligence artificielle à l’intelligence humaine et émotionnelle, et non les dissocier et identifier les tâches qui doivent être faites par la machine lorsqu’elle est plus efficace que l’homme et celles qui doivent être réalisées par l’homme lorsque son jugement, sa déontologie, son analyse et son expérience sont incontournables. » (1) L’avocat est formaté comme un expert du droit.  Ensuite sans aucune formation spécifique, il doit se constituer une clientèle s’il veut un avenir au sein du cabinet. Il n’est pas formé pour affronter les nouveaux défis du monde digitalisé et collaboratif. Les nouveaux perspectives de formation se dessinent à l’horizon. Au-delà des hard skills (finance, informatique, communication, gestion de projets) pour lesquels l’avocat se doit d’acquérir les compétences de base, il s’ouvrira aux soft skills qui développent les compétences humaines et relationnelles (écoute, empathie, acceptation de l’échec, créativité, agilité, adaptabilité, gestion des émotions, lâcher prise) et qui touchent plus au savoir-être qu’au savoir-faire. Ce changement d’approche devrait être initié dès l’université.

Pour répondre aux questions complexes et pluri-disciplinaires, seule une démarche transversale sera efficace. Cela va bouleverser la manière de travailler de l’avocat : les cloisons vont s’effriter ; le travail en équipe se développer. L’échange de l’information devient la règle, le partenariat avec d’autres professions représente le moyen d’offrir des solutions innovantes au client.  Le développement de la créativité sera indispensable pour rester agile et anticiper le futur.

L’avocat va métamorphoser sa posture. L’expert détenteur de la connaissance se transforme en passeur d’expérience et co-créateur de solutions. Le client ne viendra plus pour recevoir une réponse juridique abstraite et peu lisible, mais partagera une expérience commune avec son avocat. Ils vont élaborer ensemble la meilleure solution juridique avec un regard holistique. Le client devient acteur de son dossier.

La jeune génération des avocats ne se satisfait plus du modèle ancien et veut entrer dans le modèle collaboratif. Le cabinet traditionnel organisé de manière pyramidale avec un associé, un collaborateur senior et plusieurs collaborateurs juniors est remis en question. Le système était rentable car les collaborateurs étaient facturés à un taux horaire plus élevé que leur coût interne. Ce système a connu des dérives : le travail était effectué par les collaborateurs juniors et l’accent était mis plus sur le nombre d’heures facturées que sur le service au client et la pro-activité.

Aujourd’hui les clients sont réticents à payer la formation des jeunes collaborateurs, à supporter les coûts de l’organisation internes. Le modèle du taux horaire ne dynamise pas l’organisation à se structurer de manière plus efficiente et les clients en ont pris conscience. (3) Le travail en équipe sera privilégié. Les jeunes sont plus attentifs à la qualité des relations en interne, souhaitant recevoir des objectifs à atteindre, être flexible en terme de mobilité et d’horaire. Cela conduit à développer un management horizontal plutôt que vertical pour la circulation des informations et la prise de décisions. (2) Le développement des équipes, la partage de la connaissance, l’intelligence collective et le collaboratif deviennent les mots d’ordre du cabinet libéré.

Pour les avocats, s’intéresser à l’innovation, pas seulement technologique, mais aussi économique, managériale et sociétale, est un préalable à la nécessaire transformation pour assurer la pérennité de la profession dans ce qu’elle a d’essentiel : défendre et conseiller l’humain.

 

Regardez la série d’interviews avec Me van Wassenhove ici.

 

[1] Olivier Chaduteau, Day One étude « Droit & Digital : réalité et prospective »
[2]  Rapport Haeri
[3] Georgestown report 2017
[4] Cour de Cassation (fr) du 11 mai 2017 l’autorise

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