Récemment, la loi transposant la directive européenne sur le détachement de travailleurs 2018/957/UE a été publiée. Elle s’applique aux employeurs d’autres États membres qui souhaitent détacher des travailleurs en Belgique et est entrée en vigueur le 30 juillet 2020. Cette règlementation est très importante car le détachement transfrontalier est dans de nombreux cas considéré comme une source de fraude et de concurrence déloyale.
Dans un article précédent, nous avions expliqué la précédente directive européenne sur le détachement des travailleurs 2014/67/UE.
Par détachement, on entend la situation d’un travailleur qui accomplit temporairement des prestations de travail en Belgique et qui :
- soit travaille habituellement sur le territoire d’un ou de plusieurs pays autres que la Belgique ;
- soit a été engagé dans un pays autre que la Belgique.
La directive 2018/957/UE sur le détachement de travailleurs prévoit que les travailleurs détachés bénéficient des conditions de rémunération et de travail de l’État membre où ils sont détachés. La directive fait une distinction entre le détachement de 12 mois et excédant 12 mois, de sorte que la durée du détachement détermine les conditions applicables.
La directive prévoit les conditions de rémunération et de travail et ne traite pas de la sécurité sociale.
Rémunération et conditions de travail en fonction de la durée du détachement
Détachement d’une durée maximale de 12 mois
Pour les détachements d’une durée inférieure ou égale à 12 mois, l’employeur doit respecter toutes les conditions de salaire et de travail sanctionnées pénalement et qui découlent des dispositions légales et des conventions collectives de travail rendues obligatoires, à l’exception des régimes de pension complémentaire.
Cela concerne, par exemple, les jours fériés, les vacances, la durée du travail, le bien-être des travailleurs, la non-discrimination, la rémunération etc. Ces dispositions étaient également d’application avant le 30 juillet.
Détachement excédant 12 mois
Pour les détachements excédant 12 mois, l’employeur doit appliquer toutes les conditions de salaire et de travail applicables, y compris celles qui ne font pas l’objet de sanctions pénales, telles que le salaire garanti en cas d’incapacité de travail. Les dispositions régissant la conclusion et la résolution du contrat de travail (comme les règles à respecter en cas de licenciement) ainsi que les régimes de pension complémentaire sont exclus.
En bref, en cas de détachement excédant 12 mois, l’employeur étranger doit respecter toutes les règles concernant les conditions de rémunération et de travail en Belgique et pas seulement les règles sanctionnées par le Code pénal social.
La loi contient également une disposition anti-abus dans le cas où un employé détaché remplace un autre employé détaché pour la même fonction (même travail) au même endroit. Dans ce cas, la période de détachement des deux travailleurs est prise en compte ensemble pour déterminer la période de 12 mois.
La période de 12 mois peut être prolongée d’une période supplémentaire de 6 mois sous réserve d’une notification motivée au SPF Emploi, Travail et Concertation sociale avant l’expiration de la période de 12 mois.
Les allocations et indemnités liées au détachement
Les allocations directement liées au détachement et payables par l’employeur sont considérées comme faisant partie de la rémunération dans la mesure où elles ne concernent pas les dépenses effectivement encourus dans le cadre du détachement, telles que les frais de déplacement, de nourriture ou de logement.
Les indemnités de déplacement, de nourriture ou de logement doivent correspondre aux frais encourus par les travailleurs détachés pour leur voyage vers ou depuis leur lieu habituel de travail en Belgique ou lorsqu’ils sont envoyés temporairement par leur employeur de leur lieu de travail habituel en Belgique vers un autre lieu de travail (par exemple à l’étranger).
S’il n’est pas possible de déterminer quels éléments de l’allocation couvrent les dépenses effectivement encourues et quels éléments constituent une rémunération, l’intégralité de l’allocation sera considérée comme payée à titre de remboursement des dépenses. L’allocation ne sera alors pas prise en compte pour déterminer si le salaire requis a été versé.
Obligation de fournir des informations en cas de recours à des travailleurs temporaires étrangers
La directive sur le détachement de travailleurs introduit également de nouvelles dispositions sur le travail intérimaire et le détachement de travailleurs.
Les employeurs belges qui font appel à des travailleurs temporaires étrangers ont les obligations suivantes :
- Lorsqu’un travailleur intérimaire est détaché à partir d’un autre État membre vers un utilisateur belge, ce dernier doit informer par écrit (électroniquement ou sur papier) l’entreprise de travail intérimaire des conditions d’emploi et de travail applicables.Les conditions d’emploi et de travail comprennent la durée travail, les heures supplémentaires, les temps de pause, les périodes de repos, le travail de nuit, les congés, les jours fériés, la rémunération, la protection des enfants et des jeunes et des mères pendant l’allaitement, l’égalité de traitement entre hommes et femmes et toutes les mesures visant à lutter contre la discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique.
- L’utilisateur belge d’intérimaires doit également informer au préalable et par écrit l’entreprise de travail intérimaire si le travailleur intérimaire étranger travaillera en Suisse ou dans un autre État membre de l’EEE. La même obligation s’applique également au détachement de personnel.
Si l’utilisateur belge ne respecte pas cette obligation d’information, il risque une sanction de niveau 2, c’est-à-dire une amende de 400 à 4000 euros ou une amende administrative de 200 à 2000 euros.
Non-applicabilité au secteur du transport routier
Les règles de la directive révisée sur le détachement de travailleurs ne s’appliquent pas au secteur du transport routier, à l’exception de celles concernant l’obligation de fournir des informations lorsqu’un travailleur intérimaire est détaché en Belgique.
Pour le secteur du transport routier, l’ancienne directive s’applique donc toujours.
Enfin, la transposition de la directive a également des conséquences pour l’employeur belge. L’employeur belge qui souhaite détacher un travailleur dans un autre État membre doit désormais tenir compte des règles nationales applicables au détachement dans l’État membre dans lequel le travailleur est détaché. Il doit donc lui aussi être attentif.
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