20 Sep 2017 | Avocats, Nouveauté

L’indépendance de la profession d’avocat n’est plus à l’ordre du jour

Par Jubel

Opgelet: dit artikel werd gepubliceerd op 20/09/2017 en kan daardoor verouderde informatie bevatten.

Une police « G » ?

Le Ministre de la Justice Koen Geens aura une ultime entrevue additionnelle avec la nouvelle administration de l’ Orde van Vlaamse Balies  (le regroupement des barreaux flamands) et l’Ordre des barreaux francophones et germanophone en octobre 2017 sur sa proposition d’ A.R. pour déterminer les conditions minimales auxquelles une police d’assurance de protection juridique doit correspondre, pour que le prime soit déductible fiscalement.

Le but du Ministre – on peut se poser la question si c’est le seul but du Ministre – avec la proposition actuelle de l’A.R est de rendre l’assurance de protection juridique plus attrayante pour le citoyen. Les personnes de classe moyenne auraient de l’intérêt dans la déduction fiscale du prime d’une police « G ».

La police « O » !

La police de protection juridique existante[1] qui était de la main de son prédécesseur, le Ministre de la Justice Laurette Onckelinckx, ne serait pas un succès. Je ne le sais pas vraiment, et je ne sais non plus si les différents ordres d’avocats ont communiqué une évaluation annuelle au Ministre de la Justice comme prévu dans l’A.R. Cette évaluation servirait aussi pour obtenir les propositions et suggestions de la part des barreaux sur l’assurance de protection juridique existante.

L’ A.R. existant prévoit l’exemption de taxe annuel sur les opérations d’assurance et des fois s’avère plus ample[2] que la proposition actuelle, des fois se montre plus limité.

Il est important que l’A.R. n’a pas de liste en annexe avec des valeurs maximales, ni qu’il y a question de « conventionner » des avocats.

En plus les ordres d’avocats – pour autant que je sache – n’ont jamais été impliqués dans la rédaction de l’arrêté en question, tout comme ils n’ont jamais été entendus pour la police de protection juridique « voitures » ou la protection juridique de la police « familiale ».

Le marché des assurances 

Il va de soi qu’i n’y a aucun problème que les assureurs lancent sur le marché un nouveau produit, ou un produit renouvelé. Les assureurs, tout comme les autres entrepreneurs, sont libres de lancer sur le marché des nouveaux produits ou des produits adaptés.

Il ne consiste non plus un problème qu’on offre aux habitants de ce pays encore une assurance en plus pour tempérer les incertitudes  – principalement mentales – de la vie.

La façon selon laquelle le Ministre de la Justice apprête un produit pour être lancé sur le marché s’avère bel et bien un problème pressant.

Les citoyens de notre pays transfèrent leur revenu imposable à l’administration sociale de la société plus que la moyenne européenne. On a le droit de se poser la question : pourquoi de nouveau faire appel au citoyen pour un financement supplémentaire de son droit constitutionnel à la protection juridique?

Appel

Je laisse le Ministre et le citoyen à coté pour me diriger exclusivement aux avocats et plus spécialement à leurs représentants dans l’Ordre des Barreaux Flamands (OVB).

Une négociation exiguë

Il est effrayant de voir comment les représentants de la profession d’avocat continuent à se mettre à table avec le Ministre, non pour préserver l’indépendance de l’avocat, mais en vertu d’un faux espoir de solutionner une nécessité financière pendante dans la profession d’avocat.

Les rapports susdits sur les négociations qui ont eu lieu entre le gouvernement et les représentants de la profession d’avocat ne font pas preuve d’un dialogue fondamental, mais si sont témoin d’une attitude plein d’angoisse qui se tient par un dictat.

Sous la devise « l’assurance de protection juridique, de toute façon, elle viendra » les représentants du barreau produisent – au moins évaluent – un produit économique dans un marché que ne leur appartient pas.

Ces représentants oublient carrément que la police de protection juridique (la police « O ») existe déjà en conséquence de l’A.R. du 15 janvier 2007. Cet A.R. préserve les valeurs fondamentales de la profession d’avocat et, dans quelques aspects essentiels, se montre plus avantageux pour l’assuré.

Une lourde erreur

Les représentants de la profession d’avocat se trompent énormément et nuisent à la valeur principale de la profession : son indépendance.

L’indépendance de l’avocat, je cite le code CCBE[3] …

Indépendance

Art. X. 2.1.1. La multiplicité des devoirs incombant à l’avocat lui impose une indépendance absolue exempte de toute pression, notamment de celle résultant de ses propres intérêts ou d’influences extérieures. Cette indépendance est aussi nécessaire pour la confiance en la Justice que l’impartialité du juge. L’avocat doit donc éviter toute atteinte à son indépendance et veiller à ne pas négliger l’éthique professionnelle pour plaire à son client, au juge ou à des tiers.

Art. X. 2.1.2. Cette indépendance est nécessaire pour l’activité juridique comme pour les autres affaires judiciaires, le conseil donné à son client par l’avocat n’ayant aucune valeur réelle, s’il n’a été donné que par complaisance, ou par intérêt personnel ou sous l’effet d’une pression extérieure.

… est la valeur fondamentale de l’avocat.

Les négociations avec le gouvernement et les assureurs sur le « conventionnement » et les tarifs, sans avoir aucun débat profond, menace l’indépendance de la profession, la valeur centrale qui devrait être préservée en premier lieu par les représentants de la profession d’avocat.

J’entends les avocats se poser des questions à voix haute

De quelle façon cette indépendance est menacée ?

Ce n’est pas un élément positif que les tarifs proposés sont significativement plus hauts que ceux appliqués par beaucoup d’avocats ?

Ce n’est pas bien si les avocats seraient surs ou assurés de leurs honoraires et leurs frais ?

La profession d’avocat, n’est-elle déjà tarifée, entre autres pour ses abonnements avec les assureurs et le gouvernement, pour ses mandats judiciaires comme tutelle ou curatelle, médiation de dette, administration provisoire ?

Faites le bilan

  • Tarifs

– Si l’avocat exerce un mandat judiciaire, cette mission est totalement différente d’une mission de la part d’un client.

Un mandat judiciaire est sous le contrôle d’un juge, une différence fondamentale. On se responsabilise envers le juge. L’indépendance de l’avocat est une garantie pour l’exécution du mandat.

Il y a des mandats qui sont adjugés à un avocat par le gouvernement. C’est en partie une des taches de l’avocat dans notre Etat de droit.[4]

– Les avocats qui travaillent pour les assureurs par abonnement, acceptent une rémunération pour frais et honoraires qui dans la majorité des cas est déterminée par les assureurs. Dans aucun cas, ces rémunérations sont valables pour les avocats quand ils ont été choisis librement par l’assuré pour défendre son intérêt.

– Les missions gouvernementales sont soumises à une adjudication et adjugées selon des normes établies. Heureusement ces normes ne sont pas limitées par une simple comparaison des frais/honoraires des avocats qui s’annoncent.

  • Revenus garantis

En principe l’avocat détermine librement ses honoraires et en parle avec son client, après quoi ils décident s’il y a un accord et si la prestation de service sera démarrée ou non.

En cas de litige, la rémunération peut être jugé par un supérieur indépendant (un juge), tout comme c’est le cas chez d’autres entrepreneurs, sans préjudice aux paramètres légalement prévus.

Dans aucun cas, la protection juridique – comme il y en a beaucoup qui le voient comme but – ne sert à lutter contre l’appauvrissement dans la profession d’avocat, ce que cette assurance ne fera pas.

L’assurance de protection juridique n’est pas une police de revenu garanti pour avocats.

Une assurance de protection juridique est serviable à l’assuré, non à l’avocat.

L’influence du marché

Les tarifs proposés sont un mirage.

Evidemment, la rémunération maximale de frais-honoraires citée dans l’annexe de la police « G » proposée, influencera fortement le marché des services juridiques fournis par les avocats, autant qu’elle deviendra la norme de référence.

Beaucoup d’avocats utiliseront ces tarifs maxi comme référence, aussi pour le citoyen qui n’a pas de protection juridique. De cette façon le service deviendra (de nouveau) plus cher pour les citoyens, et cela à court terme.

Par contre, les affaires pour lesquelles l’assuré possède une couverture de protection juridique (dans beaucoup de cas après avoir passé par une période d’attente, en payant plusieurs annuités), l’assureur intervient comme tiers dans la détermination de l’honoraire de l’avocat. En tout cas l’assureur va tenter de maintenir les frais et les honoraires sous le maximum, ce qui est bien compréhensible. L’assureur est un entrepreneur, son but est de faire des bénéfices.

Les avocats qui pensent qu’ils seront garantis de pouvoir facturer le maximum pour toute affaire qui est couverte, se trompent énormément. Ce n’est pas l’intention, à juste titre.

Il y a des Sirènes dans le mirage !

Le « conventionnement » proposé aura une influence sur le marché des services juridiques assez incisive, non dans l’intérêt du client, non plus dans l’intérêt de l’avocat.

Si les avocats, poussés par ses propres soucis financiers, accompagnent ce « conventionnement » comme établi dans la proposition d’A.R., ils gaspilleront leur atout principal sur le marché juridique, qui est l’indépendance de l’avocat.

Gent, le 18 septembre 2017

Frank Van Vlaenderen

Avocat
Membre de l’assemblée générale de l’OVB (l’Ordre des Barreaux Flamands)

[1]   Voir A.R. 15.01.2007

http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&cn=2007011543&table_name=loi

[2] Une assurance peut être collective, valeur minimum du litige 500,00 euros, prime d’assurance pour la couverture minimale = ou < 144,00 euros

[3] Code de conduite pour les avocats européens, qui fait partie de la déontologie des avocats flamands.

[4] CEDH  affaire GRAZIANI-WEISS v. AUSTRIA (Application no. 31950/06) 18.11.2011        https://hudoc.echr.coe.int/eng#{“kpthesaurus”:[“349″,”644″,”463″,”472″,”641″,”54″,”139″,”503″,”504″,”20″,”462″,”460″,”461″,”284″],”documentcollectionid2”:[“GRANDCHAMBER”,”CHAMBER”],”itemid”:[“001-107022”]}

 

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