Lorsque l’actionnaire d’une entreprise familiale songe à se (re)marier, il est utile de s’attarder sur l’impact juridique de cette union sur la transmission de son entreprise, et ce, d’autant plus si des enfants sont nés d’une relation antérieure. Opportunité d’invoquer la ” clause Valkeniers ” ?
Qu’est-ce que “La clause Valkeniers” ?
La “clause Valkeniers”, introduite dans le Code civil en 2003, offre la possibilité aux époux de renoncer unilatéralement ou réciproquement à leurs droits dans la succession de l’autre, à condition qu’au moins l’un d’entre eux ait des enfants d’une précédente relation. La loi prévoit toutefois que cette clause ne peut s’étendre au droit du conjoint survivant à l’usufruit du logement familial et des meubles meublants qui s’y trouvent. Cette clause, bien que liée aux prétentions successorales, doit être inscrite dans un contrat de mariage, que ce soit avant ou pendant le mariage. L’intervention des deux époux est donc requise.
Une solution sur mesure ?
L’application de la “clause Valkeniers” ne signifie pas forcément que l’un et l’autre époux doivent se voir privés totalement de leurs droits successoraux. Une version modulée de la clause peut constituer une solution sur mesure pour répondre à une situation familiale donnée. Les époux ont la possibilité de renoncer à leurs prétentions successorales sur des biens spécifiques ou sur un certain type de biens de la succession. Le conjoint survivant ne se retrouvera dès lors pas nécessairement les mains vides.
Exemple :
Jean est directeur et actionnaire de l’entreprise familiale héritée de son père. Il a deux enfants d’une précédente relation. Ceux-ci travaillent dans l’entreprise familiale. Anne est sa compagne depuis plusieurs années. Cette jeune femme a elle-même une fille d’une relation antérieure. En 2018, le couple décide de se marier. Toutefois, Jean souhaite que ses enfants héritent de l’entreprise familiale s’il lui arrivait quelque chose. Il est vrai qu’en principe sa nouvelle épouse aurait des prétentions successorales sur l’entreprise familiale s’il venait à décéder…
Pour accéder au souhait de Jean, les époux ajouteront une “clause Valkeniers” à leur contrat de mariage. Ils décideront, par exemple, qu’Anne ne pourra faire valoir aucun droit sur les actions de l’entreprise familiale. Celles-ci feront partie de la succession de Jean.
Note:
Le 1er décembre 2017, le Conseil des ministres a approuvé la proposition de loi de modification du droit des régimes matrimoniaux1 dans laquelle il est proposé de permettre aux époux d’étendre (sous certaines conditions) la portée de la clause Valkeniers au logement familial et aux meubles meublants qui s’y trouvent également.
Même si la proposition de loi doit encore être approuvée par le Parlement, le but serait que la réforme entre en vigueur le 1er septembre 2018. Ainsi, l’entrée en vigueur du nouveau droit des régimes matrimoniaux coïnciderait avec celle du nouveau droit des successions.
Il est à noter que les clauses Valkeniers qui seront signées à partir du 1er septembre 2018 devront respecter les formalités des pactes sur successoraux (càd notamment que le projet de contrat de mariage contenant une clause Valkeniers établi par le notaire devra être communiqué aux intéressés au moins 15 jours avant une réunion à tenir avec le notaire, et que ce contrat de mariage ne pourra être signé qu’après l’écoulement d’un délai d’un mois suivant cette réunion). Les clauses Valkeniers passées avant le 1er septembre 2018 ne doivent pas respecter ce formalisme.
En cas de présence d’enfants d’une relation antérieure, la “clause Valkeniers” est l’une des possibilités de conserver le caractère familial de l’entreprise.
1Proposition de loi modifiant le Code civil en matière de droit des régimes matrimoniaux et modifiant diverses autres dispositions en cette matière (doc. 54. 2848/001)
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