Toute entreprise dispose d’une dénomination sociale, d’un nom commercial ou d’un logo, éventuellement d’une enseigne qui permet de l’identifier, d’être (re)connue auprès de sa clientèle, de se distinguer de ses concurrents. Parfois il s’agit d’un seul et même nom, parfois de noms différents. Au fil du temps ce nom (ou logo) peut acquérir une certaine valeur, notamment grâce à la renommée qui y est attachée. Il est donc important de connaître les droits dont vous disposez pour (ré)agir de manière adéquate et vous défendre utilement en cas d’utilisation abusive de votre nom.
Dénomination sociale, nom commercial, marque… quelle différence ?
La dénomination sociale est le nom officiel d’une personne morale. Cette dénomination est reprise dans les statuts et doit être mentionnée[1] dans tous les documents de la personne morale, en ce compris sur son site internet.
Le nom commercial est le nom sous lequel une entité se présente au public. Ce nom peut correspondre à la dénomination sociale ou être différent.
L’enseigne est le panneau apposé sur la façade d’un établissement, reprenant son nom commercial[2].
Quant à la marque, cela correspond à « tous les signes, notamment les mots, y compris les noms de personnes, ou les dessins, les lettres, les chiffres, les couleurs, la forme d’un produit ou de son conditionnement, ou les sons, à condition que ces signes soient propres à: a. distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises; et b. être représentés dans le registre d’une manière qui permette aux autorités compétentes et au public de déterminer précisément et clairement l’objet bénéficiant de la protection conférée à leur titulaire ».[3]
Quelle protection pour le nom commercial ?
Sur base de la législation en vigueur, le droit à la protection du nom commercial ne suppose pas de formalités préalables : le droit naît lors de la première utilisation publique qui en est faite (article 8 de la Convention de Paris du 14 juillet 1967 pour la protection de la propriété industrielle).
Le détenteur du droit d’un nom commercial peut s’opposer à toute atteinte à ce droit par un tiers et interdire l’usage d’un nom commercial postérieur qui pourrait créer une confusion. Le risque de confusion sera apprécié au regard de trois facteurs essentiels : la similitude des noms commerciaux, la similitude des activités commerciales et le territoire géographique. En effet, le détenteur d’un nom commercial ne peut agir que vis-à-vis des sociétés actives sur le même territoire géographique (déterminé en fonction du territoire où la société est réellement active), pour une même activité et dont l’utilisation d’un nom similaire est postérieure.
Transformer son nom commercial en marque ?
Afin de bénéficier d’une protection plus étendue, il est possible d’enregistrer un nom commercial en tant que marque. Pour ce faire, il faut s’assurer que la marque envisagée est distinctive (c’est-à-dire suffisamment originale pour que l’on puisse grâce à elle distinguer facilement les produits et/ou services de ceux offerts par un concurrent), n’est pas descriptive et est disponible (c’est-à-dire ne pas être identique ou similaire à une marque antérieure déposée pour des produits ou services identiques ou similaires).
Pour enregistrer une marque, il faut également déterminer les éléments suivants : le type de marque (figurative, verbale ou combinée), le territoire visé, les catégories de produits et/ou de services visés, qui sera titulaire de la marque.
Dans le cadre du processus d’enregistrement d’une marque, l’administration compétente peut refuser la demande, si elle estime que les critères (en tout ou en partie) ne sont pas remplis. Un tiers (détenteur d’une marque similaire antérieure, par exemple) peut également faire opposition et bloquer (temporairement) l’enregistrement de la marque.
La marque offre une protection étendue, puisque la durée des droits attachés à la marque n’est pas limitée dans le temps. Cependant, pour que l’enregistrement d’une marque reste valable, il doit être renouvelé tous les 10 ans par le paiement des frais y relatifs et il faut également que la marque soit effectivement utilisée.
Comment réagir en cas d’utilisation abusive ?
Si vous êtes confronté à une utilisation abusive de votre marque ou de votre nom commercial par un tiers, il est important de réagir rapidement (par l’envoi d’une mise en demeure, l’introduction d’une procédure, etc.) et de vous ménager la preuve de cette utilisation abusive (capture d’écran, constat, document émanant du tiers contrefaisant, etc.). A défaut de réaction de votre part, votre marque perdrait son pouvoir distinctif.
A l’inverse, si vous utilisez un nom commercial depuis longtemps et que, soudainement, un tiers vous fait le reproche d’utiliser sa marque (laquelle est identique ou similaire à votre nom commercial), vous n’êtes pas sans ressource. L’enregistrement d’une marque ou l’utilisation d’un nom commercial n’interdit pas l’utilisation de ceux-ci par des tiers, si ces derniers jouissent d’un droit antérieur, par exemple. Il peut y avoir, dans certains cas, une coexistence des droits. Pour ce faire, il est important d’utiliser effectivement et de manière suffisamment étendue son nom commercial pour communiquer avec le public et de conserver la preuve de cette utilisation.
Dans tous les cas, que ce soit pour l’enregistrement de la marque ou pour réagir en cas d’utilisation abusive ou d’injonction en cessation, il est important de veiller à être bien conseillé pour défendre au mieux ses intérêts !
Maître Julie Neuray, avocate au barreau de Liège-Huy
[1] Tout comme son numéro BCE et d’autres mentions obligatoires.
[2] Le droit lié à une enseigne est limité et ne fera pas l’objet de la présente contribution.
[3] Convention Benelux du 25 février 2005 en matière de propriété intellectuelle (marques et dessins ou modèles), article 2.1
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