La participation des victimes doit être considérée comme un élément fondamental dans l’accession de celles-ci à la justice et la réconciliation en Ouganda. La pratique a été intégrée dans ses procès par l’International Crimes Division (ICD), une division créée en 1995 au sein de la Haute Cour pour juger des crimes de guerre et contre l’humanité, mais des efforts doivent encore être réalisés par les tribunaux et le législateur pour généraliser son recours. ASF propose dans une note de synthèse une analyse ainsi que des recommandations concernant l’intégration de la participation des victimes dans le processus judiciaire en Ouganda.
Faire participer les victimes aux procédures pénales est un concept relativement nouveau dans le système judiciaire ougandais. Le Règlement de Procédures et de Preuves (Rules of Procedure and Evidence (RoPe)) de l’International Crimes Division (ICD) fait figure d’exception à cet égard puisqu’il permet aux victimes de crimes internationaux de participer aux procédures pénales. Cependant, le RoPE ne spécifie pas comment cette participation doit être mise en place.
En se basant sur les observations réalisées durant le procès de Thomas Kwoyleo à l’ICD, des échanges avec les communautés victimes et l’étude de la législation applicable, le policy brief d’ASF expose la manière dont les victimes ont été impliquées dans les procédures pénales depuis l’adoption du RoPE et identifie les difficultés rencontrées dans sa mise en oeuvre. Parmi elles, nous notons l’absence de directives claires concernant la participation des victimes ainsi que le manque de ressources mises à disposition par la Cour pour encadrer cette participation.
La Cour a pour l’instant adopté une approche réactive, ce qui entrave la capacité des avocats à impliquer réellement les victimes. La distance physique séparant les victimes des tribunaux et la longueur des procès contribuent également au manque d’intérêt manifesté par les victimes. En plus de la nécessité pour la ICD de définir des règles encadrant la participation des celles-ci, il est urgent que le Justice Law and Order Sector (JLOS) développe une stratégie claire concernant leur participation et fournisse un soutien financier à l’ICD ainsi qu’aux avocats des victimes.
Ce policy brief met également en avant des observations et des recommandations relatives aux réparations. La problématique des réparations est centrale pour les victimes et reste une de leurs motivations principales pour participer aux procédures. La possibilité de réclamer des réparations est prévue dans la RoPE. Cependant, d’importantes questions restent sans réponses et nécessitent, une nouvelle fois, un encadrement de la part de la ICD. Il n’est, par exemple, pas spécifié si des victimes n’ayant pas participé aux procédures peuvent réclamer des réparations et quelles seraient les modalités de ces réparations si elles étaient octroyées. De plus, le RoPE privilégie des compensations financières alors que les victimes manifestent souvent une préférence pour d’autres formes de réparations. Au-delà des réparations ordonnées par la cours, le législateur devrait définir un cadre plus clair concernant les réparations au niveau national pour fournir aux victimes une vision plus claire des réclamations auxquelles elles peuvent prétendre.
La participation des victimes est un élément important à intégrer dans les procédures judiciaires, particulièrement pour les victimes ayant souffert du conflit de la Région Nord de l’Ouganda. Elle doit être considérée comme centrale dans le processus de justice, d’apaisement et de réconciliation. Elle permet aux victimes de se sentir impliquées dans celui-ci en obtenant justice pour les méfaits qu’elles ont subis. Il est fondamental que les différents acteurs s’assurent que ces pratiques soient mises en place pour éviter une perte d’intérêt et de confiance dans le processus judiciaire.
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