La taxation du bénéfice peut-être reportée lorsque la plus-value trouve son origine dans une expropriation, une réquisition, un sinistre ou un événement similaire. En cas d’autre motif d’aliénation, il doit s’agir d’immobilisés incorporels ayant fait l’objet d’amortissements ou d’immobilisés que l’entreprise posséda plus de cinq ans.
Remploi en nouveaux investissements
La taxation de la plus-value sera reportée dans le temps pour autant que le montant de la vente de l’immobilisé et non seulement celui de la plus-value soit totalement réinvesti. On parle alors de remploi en nouveaux investissements. La taxation se fait suivant le rythme et le taux d’amortissements du ou des biens acquis en remploi. Concrètement, un remploi en immobilier verra la plus-value taxée sur une durée bien plus longue qu’en cas de remploi en matériel informatique.
Les conditions à respecter incluent l’obligation de réinvestir en immobilisations incorporelles ou corporelles. Il est exclu de placer le montant réalisé en fonds obligataires ou d’actions. Depuis 2011, il doit aussi être effectué dans l’espace économique européen. Si l’activité de l’entreprise prend fin avant que le bien acquis en remploi ne soit totalement amorti, le solde devient taxable au plus tard à la fin de l’activité professionnelle.
L’article 47 fixe le délai pour réinvestir le montant perçu de la cession, trois options étant possibles. Premièrement en cas de sinistre ou d’expropriation, le contribuable a trois ans pour réinvestir à partir de la fin de l’année fiscale de perception de l’indemnité; dans les autres cas (essentiellement des cessions volontaires), le contribuable doit réinvestir endéans trois ans, à partir du début de l’exercice social de la plus-value.
Risques de dérives
Mais lorsqu’il investit en immobilier, navire ou aéronef, le délai est porté à 5 ans. Il peut partir au début de la période imposable de réalisation de la plus-value ou, au choix de l’entreprise, au début de celle précédant la réalisation de la plus-value.
L’article 47 prévoit enfin qu’à défaut de remploi respectant les conditions énumérées plus haut, la plus-value devient taxable l’année durant laquelle le remploi vient à expiration. C’est pourquoi lors de sa dernière réforme fiscale de 2017, le gouvernement Michel mit en place un garde-fou pour éviter les risques de dérives. Pour éviter que des contribuables n’immunisent fiscalement des plus-values taxables à 34% et les fassent taxer à 20, 29 ou 25%, le gouvernement décida que les plus-values ne respectant pas les conditions de l’article 47 CIR seraient taxées au taux en vigueur au moment de la plus-value outre des intérêts de retard.
La situation suivante peut se présenter: une entreprise réalise une plus-value, réinvestit le montant obtenu et revend malheureusement le bien en remploi à perte quelques années plus tard. La taxation du solde de la plus-value du bien d’origine prend place l’année de cession du bien en remploi. La plus-value de l’un peut s’imputer sur la moins-value de l’autre sans que l’impôt ne soit finalement dû ni perçu. Le premier bien aura été vendu net d’impôts.
Plus-values sur immeubles
On notera encore que les SICAFI ou sociétés immobilières réglementées soumises au taux d’impôt de 12,5% ne peuvent revendiquer l’application du régime de remploi. Et que la taxation d’une plus-value étalée peut encore être neutralisée par la charge d’intérêts de financement de l’immobilisé acquis en remploi.
L’opportunité de taxation étalée est souvent utilisée par les entreprises qui estiment pouvoir financer l’impôt dû par les profits générés par le bien en remploi. Le revers de la médaille est qu’il faut pouvoir se passer du profit réalisé et réinvestir intégralement le produit de sa vente. C’est donc une démarche à long terme.
Dans les entreprises où les plus-values, notamment sur immeubles, sont fréquentes ou prévisibles, on retiendra donc à nouveau l’importance d’établir un réel planning fiscal découlant des prévisions d’exploitation.
Charles Markowicz
Associé Costmasters Fiduciaire – Centre de Résolution de Conflits
Cet article a été publié à L’Echo du 21 Mars 2019.
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