Nous avons déjà abordé précédemment les principaux points du nouveau Livre 6 du Code civil et les nouvelles règles de responsabilité lorsque vous faites appel à des «auxiliaires» (personnel, sous-traitants, etc.) dans l'exécution des contrats. Cet article se concentre sur le secteur de la construction et la manière dont les entrepreneurs principaux et les sous-traitants du secteur de la construction devront dorénavant gérer l'exécution des projets de construction et les risques associés.
Quel sera l'impact des nouvelles règles de responsabilité sur le secteur de la construction?
En tant qu'entrepreneur principal, vous êtes responsable de l'exécution complète du projet. La nouvelle loi peut s’avérer intéressante pour vous, car le donneur d'ordre peut désormais réclamer des dommages et intérêts directement au sous-traitant.
Les sous-traitants font face à un élargissement de leur responsabilité finale. Auparavant, la responsabilité des sous-traitants était souvent limitée, avec des possibilités très restreintes pour le donneur d’ordre de poursuivre directement un sous-traitant.
Quel impact sur les contrats de sous-traitance du secteur de la construction ?
Il est crucial de passer au crible vos contrats de sous-traitance et vos méthodes de travail. Des accords clairs sur les responsabilités de chacun sont essentiels pour éviter les problèmes à l'avenir. Points d’attention :
- Accords clairs : Assurez-vous que vos contrats soient juridiquement valables et aussi applicables que possible. Ne perdez pas de vue vos devis et conditions générales, et évitez les contradictions entre les conditions de l'entrepreneur principal et du sous-traitant.
- Responsabilité : Déterminez qui est responsable de quoi, comment les dommages seront indemnisés et dans quelle mesure votre propre responsabilité peut être limitée ou exclue.
- Assurance : Vérifiez si vos polices couvrent suffisamment les nouveaux risques. Les sous-traitants/auxiliaires ne sont généralement pas couverts par la police de l'entrepreneur principal.
- Supervision : Inspectez régulièrement le travail de vos sous-traitants et/ou de votre personnel pour détecter et prévenir les problèmes à temps.
Un exemple concret
Supposons que, en tant qu'entrepreneur principal, vous avez accepté la mission de réaliser un projet de villa pour le donneur d'ordre. Vous engagez un sous-traitant pour construire une piscine dans le jardin. Pendant la construction, un salarié du sous-traitant commet une erreur dans les fondations de la piscine, ce qui provoque des fuites et endommage la structure de la piscine. Il en résulte des retards et des coûts supplémentaires pour remédier au problème.
Sous l'ancienne loi (avant le 1er janvier 2025)
En raison de la quasi-immunité de l'agent d’exécution et de l'interdiction relative de concours, le donneur d'ordre ne pouvait pas intenter une action directe extracontractuelle contre le sous-traitant, sauf en présence de conditions très strictes (par exemple, si l'erreur du sous-traitant constituait une infraction pénale ou si elle ne relevait pas de l'obligation contractuelle de diligence).
En pratique, le donneur d'ordre n'avait parfois aucun autre choix que de poursuivre l'entrepreneur principal, même si ce dernier n'était pas directement responsable de l'erreur du sous-traitant. Cette situation limitait les possibilités de recours et augmentait les risques financiers du donneur d'ordre, car il devait généralement commencer par intenter une action en justice contre l'entrepreneur principal. En cas de condamnation, l'entrepreneur principal pouvait alors à son tour se retourner contre le sous-traitant pour obtenir réparation. De plus, les clauses contractuelles d'exonération de l'entrepreneur principal compliquaient le recouvrement des dommages causés par les sous-traitants, mettant souvent le donneur d'ordre dans une situation difficile.
En vertu de la nouvelle loi (depuis le 1er janvier 2025)
Le donneur d'ordre dispose de possibilités élargies de recours et peut :
- Introduire immédiatement une action extracontractuelle contre le sous-traitant, à condition que l'erreur et le dommage soient prouvés ; ou
- Introduire une action contractuelle contre l'entrepreneur principal
Le donneur d'ordre bénéficie d'une plus grande flexibilité et peut en principe demander réparation directement au sous-traitant sans passer par l'entrepreneur principal.
Toutefois, des limites subsistent : le sous-traitant peut toujours invoquer les moyens de défense qu'il pourrait également opposer à l'entrepreneur principal, tels que les clauses d'exonération prévues dans le contrat qui les lie.
Soulignons encore une nuance importante : si l'erreur du sous-traitant était délibérée ou si elle a porté atteinte à l'intégrité physique ou psychologique du donneur d'ordre, le sous-traitant ne peut se dégager de sa responsabilité, indépendamment des dispositions du contrat qui le lie à l'entrepreneur principal.
Les nouvelles règles s'appliquent-elles à tous les cas de dommages ?
Les nouvelles règles ne s'appliquent qu'aux faits commis après le 1er janvier 2025. Les événements survenus avant cette date continueront d'être soumis aux anciennes règles.
Comment savoir si vous êtes bien préparé ?
Il est important de vérifier que vos contrats et méthodes de travail soient conformes à la législation en vigueur pour éviter des problèmes juridiques et financiers et de contrôler que vous disposiez des assurances adéquates.
Posez-vous les questions suivantes et faites-vous une première idée des risques encourus :

Charlotte Humblet et Julie De Roy – Vandelanotte
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