Et si l'impensable se produisait ? Au terme d'une longue réflexion sur votre planification successorale, vous décidez de céder une partie de votre patrimoine à la génération suivante en faisant une donation à vos enfants. Quelques années plus tard, le sort s’acharne et l'un de vos enfants décède avant vous. Bien que le volet financier ne soit pas le plus important à ce moment précis, plusieurs questions finissent par émerger : qu'en est-il des biens donnés ? À qui reviennent-ils quand vous-avez une clause de retour? Cela correspond-il à votre souhait en tant que parents-donateurs à l'époque de la donation ? Nous apportons les réponses à vos questions dans cet article.
Vous comprendrez immédiatement que la réponse aux questions susmentionnées dépend entièrement de la situation en pratique. Quel est l'objet de la donation, par exemple ? S'agit-il uniquement d'argent laissé au bon vouloir des enfants ? Ou s'agit-il plutôt d'actions/de parts de l'entreprise familiale, pour lesquelles il est évidemment important de savoir dans quelles mains elles se retrouveront au décès du donataire ?
Quelle est la situation familiale de l'enfant ? Marié ? Cohabitant légal ? Quelle est la relation avec le beau-fils ou la belle-fille ? Et l'enfant lui-même a-t-il déjà des enfants, et si oui, quel est leur âge ?
En matière de planification successorale, la donation est un outil important pour céder une partie de votre patrimoine à la génération suivante de votre vivant. Pourtant, les scénarios et questions ci-dessous peuvent parfois venir paralyser les décisions de planification successorale. Sachez toutefois que vous pouvez associer la donation à différentes modalités, en tenant compte de vos souhaits, objectifs et préoccupations. L'une de ces modalités est une clause de retour conventionnel.
Qu'est-ce qu'une clause de retour conventionnel ?
Avec la clause de retour conventionnel, vous prévoyez en tant que donateur que le bien donné retourne dans votre patrimoine, au cas où le donataire décède avant vous.
La donation est en réalité dissoute si le donataire venait à décéder avant vous. Cette dissolution a un effet rétroactif, ce qui signifie qu'on part di principe que les biens donnés n'ont jamais figuré au patrimoine du donataire.
Pourquoi l'insertion de cette clause peut s'avérer intéressante ?
La clause de retour conventionnel vous permet, en tant que parents-donateurs, de récupérer les biens donnés et de réfléchir à leur destination en considérant la situation familiale, financière, fiscale, etc. du moment. Vous pourriez donc faire une nouvelle donation à vos autres enfants et/ou aux enfants du défunt (c.-à-d. vos petits-enfants) aux taux de l'impôt de donation, en accompagnant la donation des modalités qui pourraient être plus appropriées à la situation.
En tant que donateur, comment savoir s'il est judicieux de reprendre les biens donnés en cas de prédécès du donataire ?
Il est évidemment impossible de le savoir sans boule de cristal, car tout dépend des circonstances du moment.
Heureusement, il existe la possibilité d'inclure cette clause en option. Autrement dit, lors de l'élaboration de la donation, vous pouvez faire acter que les biens donnés ne reviendront en cas de prédécès que si vous, le donateur, le décidez expressément. Vous ne faites pas recours à cette option ? Les biens restent alors dans le patrimoine, et donc la succession de l'enfant.
La clause n'est toutefois pas formulée de manière facultative ? Les biens donnés reviendront alors automatiquement à votre patrimoine en tant que donateur si le donataire décède avant vous, que vous pensiez ou non que l'idée était judicieuse à ce moment-là.
Si vous prévoyez une clause de retour conventionnel facultative dans la donation, elle vous offrira une certaine marge de manœuvre à l'avenir.
Quelles conditions supplémentaires puis-je prévoir dans cette clause ?
Vous pouvez déterminer que la clause de retour conventionnel ne prendra effet que si le donataire et ses descendants décèdent avant vous. En d'autres termes, si le donataire a déjà des descendants à son décès, la clause n'entrera pas en vigueur et vous ne devez pas non plus envisager cette option.
Par exemple, il est également possible de vérifier que la clause, éventuellement assortie de l'option de recours, prend effet indépendamment du fait que le donataire ait des descendants à son décès.
En général, on ajoute également une clause de subrogation dans les documents de donation. Cette clause entraîne la restitution à la fois des biens donnés et des biens qui les remplacent.
En quoi diffère-t-elle du droit de retour légal ?
Le législateur a tenu compte de la situation où le donataire décède le premier et prévoit un retour légal, mais dans des conditions strictes. Les conditions légales sont-elles remplies ? Alors, les biens donnés reviennent automatiquement aux parents.
Quelles sont les conditions d'un retour légal ?
- Il s'agit d'une donation des (grands-)parents à un (petit-)enfant ;
- L'enfant-donataire doit décéder en premier ET être sans enfant. L'enfant décédé a-t-il tout de même déjà des enfants ? Dans ce cas, le retour légal n'est pas d'application ;
- Le bien donné est toujours en nature dans la succession du (petit-)enfant. Le (petit-)enfant peut, par exemple, ne pas avoir encore vendu le bien donné.
Étant donné le champ d'application très spécifique et les conséquences afférentes de ce régime, les donateurs préfèrent inclure une clause de retour conventionnel en cas de donation.
Par conséquent, le droit de retour légal ne fonctionne qu'en ligne directe, alors que dans le cas d'une clause de retour conventionnel, le donataire n'a pas d'importance. Vous pouvez également la prévoir dans le cas d'une donation à un frère, un neveu ou une nièce, ou à un tiers par exemple.
En substance, la clause de retour est aussi intéressante sur le plan fiscal. On part du principe que les biens donnés n'ont jamais fait partie de la succession du premier donataire décédé. Par conséquent, aucun droit de succession n'est prélevé.
Quelles sont les implications fiscales en cas de recours à une clause de retour conventionnel ?
En substance, la clause de retour est aussi intéressante sur le plan fiscal. On part du principe que les biens donnés n'ont jamais fait partie de la succession du premier donataire décédé. Par conséquent, aucun droit de succession n'est prélevé. Auparavant, la situation fiscale était toutefois un peu plus nuancée, car il existait une distinction entre une clause de retour sur les biens mobiliers et une clause de retour sur les biens immobiliers.
Nous commençons par les biens mobiliers, car rien n'a changé à ce niveau. Les biens mobiliers (par exemple, un portefeuille de titres, de parts/d'actions, etc.) sont-ils restitués sur la base d'une clause de retour ? Ils ne sont alors pas taxés (attention : l'impôt de donation potentiellement payable ne pouvait pas non plus être récupéré). Peu importe que la clause de retour soit facultative ou non. Ce principe est toujours de mise.
Quant-est il des biens immobiliers ? Autrefois, le service de taxation flamand (VLABEL) appliquait le raisonnement suivant aux biens immobiliers :
- Une clause de retour « automatique » était prévue (et le choix ne vous revenait donc pas) ? VLABEL prévoyait alors que les biens immobiliers revenaient alors automatiquement et de plein droit aux donateurs et seul un droit dit fixe était dû ;
- Une clause de retour « facultative » était prévue (et le choix vous revenait donc) ? Dans ce cas, VLABEL déterminait que les droits d'enregistrement (le droit de vente) étaient payables sur la restitution.
Autrement dit, aucun droit de succession n'était dû lors de la restitution de biens immobiliers, mais des droits d'enregistrement étaient perçus en cas de clause facultative. Ainsi, la marge de manœuvre de la clause de retour conventionnel facultative pouvait encore s'accompagner d'un coût fiscal en cas de retour de biens immobiliers.
Toutefois, depuis la jurisprudence de la Cour de cassation en 2021, VLABEL a changé sa position sur la clause de retour conventionnel facultative pour les biens immobiliers. VLABEL adopte désormais la position selon laquelle, en principe, il ne fera plus de distinction entre une clause de retour facultative et non facultative en cas de biens immobiliers. Le donateur fait-il recours à sa clause de retour facultative ? Elle n'entraînera alors plus la perception de droits d'enregistrement proportionnels.
Comment puis-je lier une clause de retour conventionnel à la donation ?
Vous voulez avoir la possibilité d'invoquer la clause de retour conventionnel si la situation se présente ? Vous devez alors pouvoir démontrer que c'était l'une des modalités de la donation.
Consignez alors la donation par écrit si vous désirez une clause de retour conventionnel. S'il s'agit d'une donation de biens mobiliers, cette clause ne doit pas nécessairement être reprise dans un acte notarié pour être valable. Ces documents peuvent également être rédigés sous seing privé. Pour une donation de biens immobiliers en revanche, il faut se rendre chez le notaire.
Conclusion
Dans cet article, nous nous sommes penchés sur les bases de l'une des modalités que les parents-donateurs peuvent prévoir dans une donation, à savoir une clause de retour conventionnel. Cette clause vous permet d'anticiper dans une certaine mesure le prédécès du donataire de la donation.
Le contenu concret de cette clause dépend de vos souhaits et objectifs spécifiques. Vous désirez plus de marge de manœuvre dans l'application de cette clause ? Vous pouvez alors la rendre facultative.
En vertu de la position actuelle du VLABEL, il ne fait en principe plus de distinction entre une clause de retour facultative et non facultative en cas de biens immobiliers.
La clause de retour conventionnel n'est qu'une des modalités que vous pouvez lier à la donation. En fonction de vos objectifs (par exemple, garder un certain degré de contrôle et/ou réserver une source de revenus, etc.), il existe également l'interdiction d'aliénation, la clause d'exclusion, l'usufruit, etc. pour n'en citer que quelques-uns.
Finalement, envisagez-vous de faire établir un mandat de protection ? Alors, étudiez également l'éventualité et la mesure dans laquelle il faut inclure la réalisation de donations ou la prise de décisions dans le cas de clauses facultatives en donation.
Vous désirez de plus amples informations sur les possibilités et modalités des donations ? Ou d'autres aspects et possibilités en planification successorale ? N'hésitez pas à contacter l'un de nos experts !
Rob Corten, Senior Advisor Legal Vandelanotte
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